
Lundi 27 novembre 2023
Reprise du travail ce matin, après un arrêt de deux semaines. Tant de sensations traversent mon corps, tant de questions qui s’entrechoquent dans ma tête et pour lesquelles je n’ai pas les réponses. Cette impression que tout se mélange, que rien n’est à sa place, même moi, quelle est ma place dans tout ce brouhaha ?
L’appel à ma mère tout à l’heure n’a bien évidemment pas répondu à cette question. D’un point de vue relativement objectif sur mes prises de décisions ces deux dernières années, ma fille de dix-sept ans se retrouve à travers moi, elle y trouve des repères féminins qu’elle n’a pas avec sa mère biologique.
Mon fils de vingt ans, quant à lui, a perdu tous repères depuis ma vaginoplastie en mars dernier. Il a développé une forme de machisme et d’agressivité, j’ai totalement perdu tout contrôle avec lui.
Et ma mère, parlons en !!! Elle a fini par accepter la situation, oui, je suis sa fille, c’est même écrit sur son livret de famille me dit elle, mais elle me rappelle sans cesse que j’étais son fils. De mon point de vue, je pense ne l’avoir jamais été quoi qu’il en soit.
J’ai également eu mon frère au téléphone ce même jour, pour lui aussi la situation est compliquée, de mon côté, j’essaie de forcer la rencontre, ça fait plus de deux ans que nous ne sommes pas vus. Mais là encore un échec, « de toute façon, je vois tes photos sur Facebook » me répond-il. Évidement !!! Quelle idiote je fais !!!
C’est compliqué dans ma tête, ça me perturbe au plus haut point et je ne sais comment sortir de cette impasse. Ça fait déjà plusieurs semaines que j’ai cette impression qui me hante, cette impression de perdre pied, que malgré le fait d’être fière des décisions que j’ai prises, tout reste compliqué.
Je passe un obstacle, un autre m’attend juste derrière. Certes, les petits pas font avancer quoi qu’il en soit, mais là, j’avance à pas de fourmi. Ces refus et le fait de toujours me rappeler ce que j’ai pu être par le passé me fait du mal, toujours et ENCORE …..
Depuis le début de ma transition, j’ai toujours montré une image de moi comme une femme forte, mais ces derniers temps, toutes mes faiblesses me ressortent tel la foudre qui vous tombe dessus.
Mon hyperémotivité c’est amplifiée, et j’ai de plus en plus de mal à gérer mes émotions. Tout ce que ressent est surmultiplié. Tout devient plus difficile, il va me falloir ENCORE trouvé des solutions. Faudrait-il déjà que j’identifie la vraie nature du problème, et là, ce n’est pas gagné. Il y a quelque temps, une amie lors d’un repas m’avait dit :
– Maintenant que tu es une femme, tu vas avoir des problèmes de femme…
Elle a tellement raison !!!!
C’est très certainement là la nature de mes incertitudes actuelle, il me faut coute que coute, trouver comment gérer ce passage. Je suis certaine d’y arriver, mais j’ai besoin d’un minimum de temps pour y parvenir. Tellement de choses se bousculent dans ma tête, je clôture ce moment d’écriture pour aujourd’hui.
Mercredi 29 novembre
Une journée toute particulière pour moi.
J’ai eu mon rendez-vous tant attendu depuis des semaines. L’entretien démarre, je mets tout de suite les choses au clair, je présente les faits, et suis la première à donner mon point de vue sur l’incident.
Malgré la tension qui me submerge, je garde mon calme, et les objectifs pour lequel je me défends. La directrice ainsi que la psychologue qui par son comportement a à son insu a déclenché cet entretien, respecte mes opinions et comprennent mon point de vue.
Elles m’expliquent chacune leur démarche, nous discutons du but initial qui doit être atteint. Chacune explique sa démarche en fonction de ses obligations, et toutes respecte l’autre. Nous mettons toutes nos capacités en œuvre afin de résoudre un litige qui au départ n’a pas lieu d’être, ce malentendu doit se résoudre, il ne peut en être autrement.
Notre échange sur le problème dure environ vingt minutes, la suite est toute particulière, on est autour de la table, et sans nous en rendre compte, nous nous mettons à travailler ensemble, pour trouver une procédure afin que cette situation ne se reproduise pas.
Le rendez-vous durera quarante-cinq minutes, mais le résulta final est là. Bilan des courses, chacune présente ses excuses à l’autre, moi la première en début de cet échange, bien sûr, j’accepte ses excuses, je la sens très sincère, forcément. Je sors l’esprit beaucoup plus léger de cet entretien, je m’en réjouis, ça m’a clairement fait le plus grand bien psychiquement, j’espère que mes nuits vont être plus légères à compter d’aujourd’hui.
Suite de la journée, ce soir c’est sortie au théâtre, une amie m’a invitée à voir la pièce drôle de genre, joué par Victoria Abril, Lionnel Astier, Jade-Rose Parker, et Axel Huet.
C’est la première pièce de ma vie que je vois, et très franchement, sans avoir d’autre référence sur quoi m’appuyer, c’est LA pièce que je souhaitais voir, c’est la pièce en total concordance avec ma vie.
Quand bien même le sujet est bien sûr très sensible, elle est abordée avec la plus grande subtilité, les quinze voir vingt premières minutes me touche au plus profond, un moment arrive ou je suis même sur le point de sortir de la salle, mais j’ai besoin d’en voir plus.
Après tout c’est du théâtre de boulevard, combien même c’est rempli de vérité qui me marque, les artistes sont exceptionnels,
Victoria Abril est magnifique, le rôle lui va à merveille, Lionnel Astier dans son rôle du « facho » réac est parfait, rien à redire, je sors de cette pièce quelque peu émue, mais le cœur comblé. J’espère très sincèrement que pour le futur, cette pièce sera une référence sur ce sujet
